La tribune
Par Monique Sassier, Présidente de la fondation AUTONOMIALa médiation familiale, pour restaurer des liens
Nous sommes nombreux à avoir rencontré, dans notre famille, chez nos amis, ces situations de conflit qui opposent frères et sœurs pour organiser l’arrivée en Ehpad d’un père, d’une mère, ou d’un grand-parent. D’abord il y a la résistance de l’ancien. Il y a aussi l’inquiétude des siens et, peut-être, leur sentiment partagé d’une décision inadaptée. Pour tous, ce sera comment faire avec l’histoire familiale, et comment faire pour vivre mieux, loin des conflits passés, et toujours présents sans doute.
Ces questions nous interrogent tous :
- Qui va prendre en charge les dépenses ainsi occasionnées ?
- Pourquoi une telle méfiance à l’égard des personnels soignants ou des aidants ?
- Comment comprendre le retrait de notre ancien, refusant toutes les aides comme réponse à l’arrivée en Ehpad, et comment faire avec la lassitude des aidants qui font au mieux ?
- Pourquoi les services d’aides à domicile peinent-ils autant à se faire accepter et reconnaître ?
- Que cache ce désenchantement des services face aux institutions et directions d’établissement dont on dit « qu’ils n’entendent rien » des difficultés des professionnels ?
C’est justement là l’objet de ma proposition : comment écouter pour s’entendre !
En effet, directeurs d’Ehpad, services d’aide à domicile, professionnels de l’action médico-sociale font souvent état de ces conflits, parfois dévastateurs, entre les familles et les personnes résidant en Ehpad. Mais aussi entre les professionnels de l’action médico-sociale ou entre les résidents eux-mêmes avec les structures qui les accueillent. Il y a aussi ceux entre des professionnels qui interviennent chaque jour et qui, bien que largement décrits, restent souvent difficiles à identifier, et plus difficiles encore à résoudre.
Tous, sources de souffrance, finissent par constituer un « point aveugle », ce qui peut faire obstruction à l’installation du bien-être.
En s’intensifiant entre toutes les personnes et les organismes sensés aider, soigner, rassurer le résident comme sa famille, les conflits risquent de masquer le sujet majeur, celui-là même qu’ils devraient résoudre : comment garantir le bien-être des personnes et comment s’assurer de la bienveillance dont doivent faire preuve les professionnels à l’égard des personnes qui ont besoin d’être soutenues.
La gestion des ressources humaines, les réunions de service, les débats ou discussions avec les personnes en difficulté relationnelle font certes partie des réponses à notre disposition. Cependant, pour réellement écouter et s’entendre, la médiation familiale offre une réponse différente, qui tient à sa définition même, son impartialité.
Qu’est-ce que la médiation familiale ?
S’inscrivant dans la définition générale de la médiation, la médiation familiale se définit comme un processus de communication reposant sur la responsabilité et l’autonomie des participants, dans lequel un tiers impartial, indépendant et neutre, favorise, par des entretiens confidentiels, l’établissement, le rétablissement du lien social, familial, la prévention ou le règlement de la situation en cause.
Le médiateur familial est un professionnel formé et diplômé, avec pour mission de réconcilier les différents acteurs et d’aider à la renaissance des liens entre les personnes. Sa présence offre un cadre particulier aux familles pour se réunir avec leur parent âgé, dialoguer ensemble des sujets qui alimentent la discorde. Le médiateur s’assurera que la personne concernée tienne une place centrale dans le processus de médiation, valorisant ainsi ses compétences quelles que soient ses difficultés.
Et c’est bien là un des atouts majeurs de la médiation familiale : mettre en évidence les compétences de la personne concernée et trouver ainsi matière à un accord qui garantisse l’avenir, avec pour objectif la réassurance de chacun sur son rôle.
Des effets bénéfiques pour tous
La place donnée à la personne rappelle à la famille comme aux professionnels que ce parent âgé ou handicapé est le premier sujet concerné. Et qu’il doit donc être écouté, informé, consulté pour toute décision à prendre le concernant. Ainsi sollicitée, la personne reprend sa place de sujet de droit, d’acteur des décisions et tout simplement sa place d’homme ou de femme agissant dans et sur son environnement.
L’autonomie de la personne est le souci premier dans la conduite de la médiation.
Le bon déroulement d’une médiation familiale garantit la qualité des relations entre l’ancien et son entourage familial. En ce sens, elle peut contribuer à éteindre des ressentiments aussi anciens que pesants et à retrouver un sentiment de liberté.
Pour entreprendre cette démarche, on peut demander la liste des associations et services de médiation familiale en s’adressant à la Caisse d’allocations familiales de sa ville.
Avec la médiation, le conflit peut devenir une opportunité pour poser, avec les professionnels, les nouvelles bases d’une coopération qui fasse sa place à chacun et vienne nourrir les échanges à venir. Et cette résolution de conflits chronophages, parfois dévastateurs, c’est l’écoute offerte par la médiation familiale qui la permet, par la prise de conscience de leur origine, afin de les dépasser.
La médiation familiale peut en effet représenter cette alliée pour un vieillissement plus heureux, au bénéfice de toutes les parties. Ainsi, participe-t-elle d’une autonomie construite, reconstruite, qui facilitera la reconnaissance de liens apaisés.